RENCONTRE 21/05/2001

Agrégation de mathématiques : « l’épreuve de modélisation en 2002 »

 

 

Préambule: tous les propos tenus ci-dessous par les membres du jury sont reproduits ici avec leur accord et sous leur contrôle.

 

Compte rendu

 

 

La réunion du 21 mai 2001 à l’IHP  à Paris,  s’est déroulée dans une ambiance collégiale en présence d’environ soixante préparateurs à l’agrégation représentant un grand nombre d’universités auxquels s’étaient joints le président (Alain Lichnewsky) et quatre membres du jury (Paul Doukhan, Hervé Le Dret, Bertrand Maury et François Sauvageot).

Après l’ouverture de la séance par les organisateurs, Alain Lichnewsky a dressé un bilan fort satisfaisant de l’épreuve de modélisation depuis sa création en 1999. Il  constate chez les candidats une certaine maturité et une bonne adaptation aux requis et modalités de l’épreuve (pluridisciplinarité, démarche de modélisation, illustration sur ordinateur). Cela encourage le jury à substituer  progressivement  au choix actuel entre textes et leçons, une épreuve exclusivement portée sur des textes.

Par ailleurs, la poursuite de la création par les préparateurs de sites web consacrés à la modélisation est fortement encouragée. Cela apporte aux candidats les conditions propres à mieux les guider et permet une meilleure communication entre préparateurs.

Alain Lichnewsky  finit son intervention en insistant sur l’intérêt d’une telle rencontre et sur l’importance du dialogue entre membres du jury et préparateurs.

 

Après cette introduction préliminaire, la séance se poursuit par un débat sous forme de trois tables rondes dont les principaux échanges peuvent être résumés comme suit :

 

 

      Table ronde 1  :  Programme et thèmes

 

· Quel est le poids respectif du programme des deux options et peut-on  parler  d’un équilibre évitant  tout effet pervers tant au niveau  de la préparation  que  de la  détermination  des choix par les  candidats ?

(A. Lichnewsky) On peut parler d’un certain équilibre entre les options. Le programme de l'agrégation est établi en fonction des besoins de l'enseignement. Le jury participe à l'élaboration de propositions, qui doivent être approuvées par divers services de la DPE et de l'IGEN.

· Comment justifier l’existence de deux options sachant que la pluridisciplinarité est un des objectifs de cette épreuve ?

(A. Lichnewsky) Supprimer les options conduirait à un éventail de connaissances trop vaste pour les candidats. L'idée de la suppression des options a cependant des partisans, ceci aurait l'avantage d'une meilleure couverture d'ensemble de la discipline, et d'une plus grande flexibilité dans l'utilisation des agrégés dans l'enseignement . Etant donné l'ampleur de l'effort de recrutement que le MEN devra effectuer dans cette décennie pour combler les départs à la retraite, les universités pourraient réfléchir à une amélioration des cursus de licence et maîtrise permettant de fondre les deux options dans un tronc commun

 

· Comment peut-on bien définir le contenu d’un thème formulé  par deux ou trois mots ?

(A. Lichnewsky) Le reproche était fait auparavant que les thèmes étaient trop pointus. A présent, il a été proposé comme nouveaux thèmes d’application (en remplacement à la cinétique chimique et la dynamique des populations) l’un moyennement ouvert, propagation d’ondes, l’autre très ouvert,  télécommunications.

 

· Pourquoi un thème aussi historiquement important que la mécanique n’a pas encore figuré parmi les thèmes  proposés? D’autre part, le jury prend-t-il soin de proposer des thèmes  pouvant illustrer toutes les parties du programme (problème de l’illustration des séries de Fourier lors des sessions 99 et 2000) ?

(H. Le Dret  et B. Maury) La dernière critique est justifiée ; quant à  la mécanique, elle sera peut-être au programme lors des sessions ultérieures.

(A. Lichnewsky) Dans le cas où le candidat traite une application ne faisant pas partie des thèmes officiels,  il n’est pas sévèrement pénalisé si celle-ci est pertinente.

 

· Que recouvre le thème « géométrie effective » ?

(A. Lichnewsky) Il s’agit de la géométrie symbolique et de la CAO ( Bézier…).

 

· Les préparateurs et les bibliothécaires souhaiteraient que les thèmes durent plus d’une année. Par ailleurs, comment peut-on éviter le bachotage sachant par exemple qu’un système différentiel autonome peut se retrouver sous des noms différents dans plusieurs thèmes  déjà soumis?

(A. Lichnewsky) En moyenne, le renouvellement de quatre thèmes est effectué par quart. Concernant le bachotage, le jury  s’en aperçoit facilement.

 

· Pourquoi ne pas rajouter une bibliographie à chaque thème?

(A. Lichnewsky)  Le jury fera en sorte de publier une bibliographie pour chaque thème.

 

 

      Table ronde 2 :  Les textes et les leçons

 

· Comment sont élaborés et réutilisés les textes proposés aux candidats?

(H. Le Dret) Ce sont les membres du jury qui les rédigent. Ensuite, il sont relus par d’autres membres. Ces textes sont réutilisés tout au cours d’une session et leur choix se fait par tirage au sort.

 

· Les textes sont-ils tous suivis de suggestions de développements  comme certains seulement dans l’ouvrage de la collection Scopos?

(A. Lichnewsky) Oui ; il s’agit d’un effort personnel du jury.

 

· Les thèmes d’application exigent des connaissances de spécialiste dans  chaque domaine proposé. Qu’attend  concrètement le jury d’un candidat  interrogé sur un texte?

(H. Le Dret) Le jury essaie toujours de respecter le programme officiel dans les textes. Il s’ensuit que ces derniers restent très superficiels en termes de connaissances spécifiques du domaine.

(A. Lichnewsky) Il n’est pas nécessaire, ni de comprendre tout le texte, ni de tout exposer. La première année, les textes, extraits d’articles, étaient trop longs et trop lourds. A présent, ils sont entièrement réécrits et adaptés. Concrètement, on demande au candidat d’avoir un esprit de synthèse correspondant bien aux exigences du métier d’enseignant.

(B. Maury) Par exemple, tous les textes sur les télécommunications peuvent être abordés sans connaissances spécifiques en télécommunications.

 

· Si les textes sont les seules modalités d’interrogation ultérieurement, sera-t-il pertinent de garder des thèmes au programme ?

(A. Lichnewsky) Ceci est à discuter. Le candidat est plutôt jugé sur sa méthode de travail en temps limité, sur sa capacité de prise de décision dans la préparation d’une intervention pédagogique et enfin sur son esprit de synthèse.

 

· Dans certains intitulés de leçons, il est stipulé explicitement « Applications issues des thèmes du programme ». Pourquoi dans ceux-ci et pas dans d’autres?

(A. Lichnewsky) Il s’agit d’une certaine façon d’insister sur l’importance des applications pour ces leçons.

 

· Comment le jury peut-il réussir à préparer des textes intéressants en nombre suffisant?  Plus il y a de textes, plus il y a d’erreurs; moins il y a de textes,  moins il y a d’équité…

(A.Lichnewsky) Le jury effectue un travail important sur les textes, pour lequel nous espérons une rétribution symbolique au terme d'une longue négociation. Le jury dans son ensemble est motivé à promouvoir les textes de modélisation comme des exemples d'utilisation des connaissances mathématiques dans la résolution de problèmes réels. Ceci est requis pour que notre discipline retrouve le dynamisme et l'impact qu'elle mérite dans l'enseignement du second degré. Si les mathématiques ne parviennent pas à motiver les élèves à travers les TPE et les TIPE, les conséquences seront lourdes pour notre discipline et le potentiel humain national que nous devons développer.

 

 

Table ronde 3 : Logiciels, ouvrages, web et questions diverses…

 

· Est-il nécessaire dans la pratique de l’épreuve de connaître deux logiciels?

(A. Lichnewsky) Vue  la disparité des thèmes et des leçons, il est conseillé de maîtriser deux logiciels, l'un de calcul formel, l'autre de calcul numérique. Par exemple, sur le résultant, mieux vaut utiliser Maple alors que sur la stabilité de schémas, mieux vaut recourir à Scilab. Cette requête est d’ailleurs raisonnable pour des candidats ayant passé 5 ans dans l’enseignement supérieur. En outre, il n’est pas demandé d’être un virtuose de l’informatique. Le jury a déjà été impressionné dans le passé par la qualité de certains programmes de 5 lignes seulement, ainsi que par des productions plus substantielles suggérées par certaines leçons.

 

· Que se passe-t-il  si le programme contient des erreurs lors de l’exécution?

(B. Maury) Cela peut se révéler sans conséquences sur la note informatique car le jury n’exige pas des connaissances importantes en programmation. Il ne s’agit pas d’une épreuve de dextérité ou d’informatique.

(A. Lichnewsky) Par contre, le candidat est jugé sévèrement si le jury s’aperçoit qu’il a recopié le script d’un livre en en oubliant une partie.

 

· La boite  à outil Styxbox pour Scilab contenait des erreurs l’an passé. Cela  a pénalisé les utilisateurs de Scilab.  Qu’en est-il pour les sessions à venir ?

(A. Lichnewsky) Le problème est en train d’être résolu.

 

· Est-ce qu’une partie de la note finale est allouée à l’illustration  sur ordinateur?

(A. Lichnewsky) Le jury évalue l’ensemble de la prestation (démarche de modélisation, utilisation des connaissances mathématiques, qualité et adéquation de l’illustration informatique, réponse aux questions). Il doit donc conserver une totale liberté de jugement et ne peut donner plus de détails que ceux  qui figurent  dans son rapport.

 

· Un manque de lissage entre les différents jurys a été constaté, certains étant plus interventionnistes que d’autres. Comment préparer le candidat à ces différentes situations ?

(A. Lichnewsky) L’harmonisation est un travail interne au jury. Le candidat doit donc être préparé à tous les scénarios, sachant qu’il n’échappera pas aux interrogations en essayant de « jouer la montre ». Au départ le candidat dispose de 15 minutes sans interruptions pour débuter son exposé; le jury peut cependant l’interroger dans ce premier quart d’heure s’il juge qu’il n’a pas été suffisamment  clair. Enfin, il doit être assez bref pour que 15 minutes restent disponibles pour des questions. 

(B. Maury) Les  attentes du jury  ainsi que les modalités d’interrogation peuvent  varier selon  les  situations.

(P. Doukhan) Un certain lissage s’effectue cependant grâce aux rotations de membres entre commissions.

 

· Comment le jury perçoit-il l’utilisation de toutes les fonctionnalités de Maple ou Matlab?

(B Maury) Cela dépend des cas. En fonction des choix du candidat, les questions conduiront sur  des voies différentes. Si des algorithmes préprogrammés sont utilisés, il est demandé au candidat de connaître ce qu’il pourrait y avoir à l’intérieur (et non ce qu’il y a réellement).

 

· Comment expliquer que le livre de J. Murray « Biological Mathematics » ne figure pas parmi les références de la bibliothèque de l’agrégation ?

(A. Lichnewsky) Effectivement, c’est un oubli.

 

· Peut-on espérer avoir la liste des ouvrages interdits longtemps avant le concours ?

(A. Lichnewsky) La liste des livres interdits n’est arrêtée que le premier jour du concours.

 

· Concernant le livre paru chez Scopos, celui-ci sera-t-il interdit et quel est le rapport du texte sur la  percolation avec les thèmes au programme?

(A. Lichnewsky) Pour la première partie de la question, la décision n’est pas encore prise.

(P. Doukhan)  Le thème associé à la percolation était géométrie effective et applications.

 

· Dans le rapport du jury, pourquoi le choix du test des générateurs de nombres aléatoires comme illustration est-il critiqué alors qu’il s’agit d’une démarche naturelle pour un futur professeur ?

(P Doukhan) Cela  a pour but d’éviter de recourir systématiquement à cette illustration.

 

· Concernant l’interdiction de certains livres, pourquoi priver sans préavis les étudiants le jour du concours de leur support de travail (en opposition à la philosophie du métier d’enseignant)?

(A. Lichnewsky) D'une manière générale, les motifs de l'interdiction sont soit que le livre n'a pas été disponible librement suffisamment longtemps avant le concours, soit que le livre constitue une suite de leçons prêtes à être reproduites en l'état. Dans le second cas le jury a estimé de façon constante et répétée que l'interdiction était la meilleure solution en évitant aux candidats la tentation de la répétition servile .... détectée en général par les questions du jury (et sanctionnée).

 

 

En conclusion, les organisateurs tiennent à remercier tous les participants (préparateurs et membres du jury)  pour leur présence active au cours de cette demi-journée et rappellent l’existence d’un forum de discussion réservé aux préparateurs pour poursuivre le dialogue engagé.

 

Adel Blouza (MC, Université de Rouen)

Laurent Dumas (MC, Université Paris 6)